Deux films en un, film de guerre fabuleusement cinématographié, jusqu’au sacrifice du dernier valeureux militaire chinois ; puis, composition plus intimiste. Parmi Les treize fleurs de Nanjing, dix-neuvième œuvre de Zhang Yimou et son premier film de guerre.
Le cinéaste-peintre sait aussi diriger les acteurs, y compris la vedette britannique oscarisée Christian Bale, le premier à jouer dans une production chinoise.
Ce film est basé sur l’histoire tragique du massacre de Nankin par l’armée japonaise qui a causé 300 000 victimes en six semaines.
Sous l’aubépine ne fleurit pas seulement une émouvante et pudique histoire d’amour : celle-ci s’inscrit dans un contexte tragique, conjurant toute naïveté. « L’arbre des héros » porte des fleurs rouges plutôt que blanches, le sang des soldats chinois victimes des Japonais l’abreuvent. Les treize fleurs de Nanjing montrera les sacrifices. Les deux films bénéficient d’une minutieuse reconstitution, cadre d’histoires malheureusement vraies, où un suspens soutient l’intérêt cinématographique.
Zhang Yimou décrit précisément la cruauté du sort meurtrissant des Chinois de l’époque. La mère rappelle qu’un faux pas peut ruiner une vie entière. Et paradoxalement, la fille feint d’autant mieux l’enthousiasme en participant à un spectacle révolutionnaire. Son innocence, plutôt que sa naïveté enchante : elle croit que partager un lit lui fait risquer de tomber enceinte.
L’art du cadrage embellit la narration, filmée principalement au Sichuan et d’un point de vue féminin, avec une caméra fluide, à l’instar des flots volontiers présents. Grâce au symbolisme, des objets banals acquièrent une valeur émotive, une lampe se chargeant d’électrons amoureux… Le coloriste Zhang Yimou montre une cinématographie picturale, avec des demi-teintes remarquablement cohérentes. L’écriture cinématographique utilise de nombreux fondus au noir elliptiques et des cartons citant la romancière 艾米, Ai Mi, confirme le retentissement de l’encre sur l’écran, dignes du cinéma muet. Le cinéaste cumule ainsi la distance auctoriale,
celle du conte, voire quelque prudence politique.
Conjointement à des fondamentaux sociologiques, tels l’importance des repas partagés en famille et couple, la badauderie, l’oeuvre, magnifique, s’inscrit dans la lignée de Mon père et ma mère, marquant en 1999 les débuts de Zhang Ziyi, le pygmalion du cinéma chinois, fait découvrir ici 周 冬雨, Zhou Dong Yu, à qui il offre le rôle principal, celui d’une fille aimant la première fois. La lumière composée par Zhang Yimou confère une certaine radiance à la peau de Mlle Zhou.
La cinéaste hongkongaise, particulièrement en vogue dans les années 90, réalisera en 2006 姨妈的后现代生活, La vie postmoderne de ma tante, déjà un sujet sur le vieillissement.
Plus consensuel, reposant sur le dépérissement émouvant d’une vieille dame, son dernier film confirme l’appétence de la réalisatrice pour la quotidienneté. Routine et intimité dans une scène laconique typique, avec l’attention si chinoise aux scènes de cuisine : Roger Leung mange ce que Ah Tao a préparé.
Les interprètes soutiennent l’intérêt de la narration. Au demeurant, Deanie Ip et Andy Lau ont souvent joué les rôles de la mère et du fils sur grand et petit écrans depuis les années 80. Deannie Yip, marraine d’Andy et retirée du cinéma en 2000, devint ainsi premier rôle avec Tao Jie, recevant en 2011 la Coupe Volpi à Venise et le Cheval d’Or à Taiwan. Le 31ème Festival international du film de Hong Kong nomma Deanna Yip et Andy Lau meilleurs acteurs. Tao Jie, une occasion de retrouvailles entre celui-ci et Ann Hui, qui collaborèrent déjà en 1982 à Boat People.
Le film s’est inspiré de la biographie du co-scénariste et producteur hongkongais Roger Lee. Des personnages du monde cinématographique apparaissent à l’écran tels que Paul Chun, Ning Hao, Sammo Hung, Tsui Hark, et Yu Dong.
Yu Lik Wai, qui oeuvra avec Jia Zhang Ke, contribue visiblement à Tao Jie.
Le chef-opérateur confère au film un style réaliste.
La vedette Yue Hong prête son talent au personnage de la conjointe méfiante, sinon ombrageuse, dont le comportement provoque de nombreuses scènes comiques. De façon générale, les acteurs jouent avec
générosité.
Lors de la vingt-septième édition pour les Coqs d’Or du cinéma, dont la cérémonie se déroula en 2009 à Nanchang, dans le Jiangxi, Yue Hong reçut le Coq d’Or de la meilleure comédienne pour un second rôle avec Un conte de deux ânes, situé au contexte de la Révolution culturelle.
Deuxième film de Han Jie, promu dans le Projet de « nouveaux talents » de Jia Zhang Ke, il reçut au Festival international du film de Shanghai en 2011, le prix du jury et celui du meilleur réalisateur.
La même année, il a été sélectionné au Festival international de Locarno.
Production coûtant 14 millions de $, Le règne des assassins équivaut assurément à un Wu Xia Pian, valorisé par le montage, des combats aériens, des arrêts sur images plutôt que les habituels ralentis. Mais ce film de sabre marie aussi Gong Fu, spiritualité, humour, amour, voire émotion finale. Pratiquant la symétrie, typique du septième art chinois, de nombreuses scènes se réitèrent, différemment connotées : volte-face contrepoint des acrobaties, épouse gardienne de son conjoint sur une chaise, puis celui-ci la défendant sur son lit pendant sa convalescence. On enterrera vivante deux fois la séduisante renarde…
Conjointement au thème de la renarde lubrique, retrouvons les traditions chinoises : nombreux plans lunaires, flashbacks, symbolisme, confucianisme, force féminine. Les décors, filmés au studio de Hengdian, au Zhejiang, arborent la haute civilisation de Nanjing : l’établissement bancaire hébergeait salon de thé et spectacle théâtral.
Le scénariste taïwanais Su Chao Pin, réalisateur de Soie, réalisa pour l’essentiel Pluie d’épées. Décelons néanmoins l’appétence de 吳宇森, John Woo : volteface à l’instar de Face/Off, deuxième Mission Impossible.
Celui-ci offrit un emploi d’assassin à sa fille, Angeles Woo. 楊紫瓊, Michelle Yeoh renoue après une décennie et son Talisman avec le Gong Fu. Assumant elle-même 90 % des cascades, l’ex-Malaisienne charme avec son sourire coquet et pudique, son désir de jouer la bonne ménagère : recevons le bol de riz qu’elle prépara.
Wang Xueqi, que nous présentâmes aux chefs-d’œuvre Mei Lan Fang et
L’orphelin de la famille Zhao, prend son habituel plaisir aux rôles de composition : en l’espèce, climax lorsque l’eunuque Roi de la Roue s’avère impuissant à assouvir la si accorte Barbie Hsu…
S’inscrivant à la suite des œuvres réalisées par le talentueux Raymond Lee en 1992, avec Tsui Hark comme producteur, et King Hu, le nouveau banquet
visuel de « l’auberge rouge 3D » coûta 35 millions de $, afin d’ajouter du relief aux personnages à deux dimensions. Adepte des contre-plongées, Tsui Hark confia l’exhibition tridimensionnelle à Chuck Comisky, responsable d’Avatar selon James Cameron.
Cependant, le second degré prévaut, dès le générique rappelant les films cantonais low tech de Wu Xia et à travers les nombreux combats tourbillonnants, voire humoristiques, dotés d’une musique décalée. Au demeurant, l’auguste Gordon Liu incarne encore Wan Yu Lou. Une excellente scène CGI consiste en la désintégration subie par une tasse de thé, introduisant Yu Hua Tian et ses étranges capacités.
Le spectateur retrouve Chen Kun, Wentai de Hua Mulan que nous résentâmes dès 2010, ici dans un double rôle : le redoutable Yu Hua Tian et son double, le niais Pu Cangzhou, hilarante composition. La trouvaille scénaristique essentielle vise l’ethnie qu’on pourrait baptiser de punk, commandée par une renarde barbare. La taïwanaise Gwei Lun Mei crève l’écran, avec ou sans 3D.
Tsui Hark débuta à la télévision et revisite toujours le Wu Xia Pian. Dès ses Histoires de cannibales en 1980 le réalisateur montre son appétence de l’anthropophagie. Le cinéaste collabora déjà avec Jet Li pour les six parties d’Il était une fois en Chine, dont il signa les trois premiers épisodes ainsi que le cinquième. Tsui Hark voulut entreprendre une carrière aux États-Unis : Double Team et Piège à Hong Kong avec Jean-Claude Van Damme.
Présentée au Festival international du cinéma de Shanghai, cette œuvre aboutie représente un film initiatique à la fois épique et ethnique. L’hospitalité chez les Kazakhs réjouira par ses nombreux chants et musiques typiques. Le film montre de multiples morceaux de bravoure, avec suspense préparé par de nombreux indices et trahisons…
Les images restituent naturellement de vastes espaces. Cependant, les intérieurs, le cas échéant dans la pénombre, mobilisent l’excellent travail sur les lumières. Les contrastes entre scènes d’intérieur et d’extérieur se révèlent bien accentués. Nous retrouvons l’appétence de Gao Feng pour les ralentis et la valorisation des chevaux.
Des fondamentaux chinois apparaissent : multiples scènes de repas, importance cruciale de l’eau, symbolisme.
Réalisateur de la virilité, Gao Feng, dont nous présentâmes déjà Mon beau pays, naquit en 1955 et réalisa La voie du loup et du blizzard en 2007, où sa doctrine s’exposait déjà.
Le Festival du film chinois en Serbie consacra son ouverture à cette œuvre ethnique, judicieusement soutenue par des chants. De nombreux musiciens collaborèrent : Wulantuoga, Se Enkebaiyaer, Sheng Quan.
Scène emblématique : lorsque dans une maison de thé traditionnelle shanghaïenne, les Mongols se disputent violemment afin de savoir s’ils restent ou retournent en Mongolie.
Mère mongole, si elle valorise l’assistance aux orphelins et abandonnés, ne pratique pas l’angélisme : des difficultés familiales existent, les vicissitudes retentissent jusque dans les prairies.
Jouant une cinquantaine de rôles au théâtre, à la télévision et au cinéma, réalisant aussi Parza Teg en 2009, Ning Cai reçut le Coq d’Or. L’artiste préside le studio officiel mongol et les Films Genghis Khan.
La vedette Narenhua incarne la figure maternelle.
杜拉拉升職記 triomphe au box-office de Xu Jinglei, incita à cette nouvelle version, dont les cols blancs deviennent dorés. Il s’agit du plus important budget mobilisé par l’actrice-réalisatrice : quelque huit millions de dollars.
Le public français retrouvera le dynamique montage qui animait Du Lala et de nombreuses allusions au film de 2010, à commencer par le partenaire, Stanley Huang, Taïwanais élevé en Californie, ses moues ainsi que sa phobie de l’ascenseur, sorti le 23 décembre 2011, réussit, sans doute grâce à son ton comique, à attirer de nombreux spectateurs chinois, malgré la concurrence des tragiquement émouvantes et de la tridimensionnelle.
Conjointement à l’humour, la ville moderne s’expose symboliquement : après la Beijing de Lala, désormais Hong Kong, l’ascension sociale s’exprimant par la verticalité immobilière. Le spectateur-auditeur entendra l’utilisation du pékinois, même dans l’enclave hongkongaise, alors que l’anglais parsème les dialogues, non seulement en affaires, mais encore lors du commerce amoureux, rapprochant ainsi entreprise et amour.
La charmante comédienne Xu Jinglei arbore sa maturité dans son jeu de séduction. Au demeurant, Amy Liang sait affecter plus de dédain que son concurrent Derek Lee. Elle ne s’entoura que de protagonistes dépassant trente ans, à l’exception du chanteur-acteur 李治廷, Aarif Lee : Henri Ma, personnage de la si virtuelle blogosphère, équivaut à un clone du célèbre Han Han, dont traita 賈樟柯, Jia Zhang Ke. Le chef-opérateur 張佳, Zhang Jia, travailla pour Jia Zhang Ke, ami de Xu Jinglei : celui-ci collabora à la première pékinoise de le 18 décembre 2011.
Outre, la réalisatrice tourna précédemment 我和爸爸, s’intéressant au sort d’une famille populaire et au père emprisonné pour proxénétisme, puis 一個陌生女人的來信, adaptée de Stefan Zweig, avec Ai Wei Wei comme « consultant créatif », adaptation de Wang Shuo, film expérimental. Constitue une excellente opportunité afin d’apprécier la façon dont l’Empire du Milieu se projette actuellement.
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